Login

Le fils n’avait pas à rapporter les fermages à la succession

La succession des parents peut réserver des difficultés grevant la sérénité familiale.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

L’histoire

Les 25 et 31 mai 1989, Louis et Valérie avaient consenti un bail à cheptel et donné à bail à ferme leur exploitation agricole à leur fils Marc. Louis était décédé le 21 juillet 2008, laissant pour lui succéder son épouse, Valérie, commune en biens, et leurs deux enfants, Léa et Marc. Aucun accord amiable n’avait pu être établi lors du règlement de la succession.

Le contentieux

Marc avait alors assigné ses cohéritiers devant le tribunal judiciaire. Sa mère, Valérie, était décédée le 16 septembre 2020 en cours de procédure.

La question posée par le litige était celle du sort de la dette de fermages dont Marc était redevable. Pendant de nombreuses années, Louis s’était abstenu de réclamer à son fils le paiement des fermages au titre du bail rural qu’il lui avait consenti. Cette dette de fermage constituait-elle une créance de la succession de Louis ou une donation déguisée rapportable à cette succession, ce qu’avait soutenu Léa dans le cadre de la procédure ?

Selon l’article 843 du code civil, seule une libéralité, qui suppose un appauvrissement du disposant dans l’intention de gratifier son héritier, est rapportable à la succession. Saisis d’une demande de rapport d’un avantage indirect à la succession du défunt, les juges doivent alors rechercher si la preuve d’une intention libérale est établie.

Pour Léa, la demande de rapport à la succession de Louis était bien fondée. En effet, son père avait renoncé pendant plusieurs années à réclamer à son fils le paiement des fermages fixés dans le bail de l’exploitation agricole. Marc avait bien bénéficié, selon elle, d’une donation déguisée, dont il n’était pas établi que Louis eût entendu qu’elle ne soit pas soumise à rapport.

Marc s’était défendu. Si son père s’était abstenu de réclamer le paiement des fermages, pour autant, il n’avait pas eu l’intention de le gratifier. Il ne s’agissait donc pas d’une libéralité soumise à rapport, mais d’un arrangement familial.

Les juges avaient pourtant écarté cette solution. Ils avaient condamné Marc à rapporter à la succession une somme de plus de 60 000 euros au seul motif que Marc ne justifiait pas de l’apurement des fermages au titre du bail rural pour la période du 1er juin 2011 au 31 juillet 2018. Il avait donc bénéficié d’une donation déguisée, qui devait être soumise à rapport.

Mais au visa de l’article 843 du code civil, la haute juridiction a censuré la décision des juges d’appel, faute d’avoir constaté l’existence de l’intention libérale de Louis, qualifié de « prétendu disposant ».

L’épilogue

La juridiction de renvoi devra se prononcer sur la question de l’intention libérale de Louis et examiner, en outre, si la volonté de ce dernier a été de dispenser Marc de toute obligation à rapport. Mais il est peu probable qu’une libéralité, dont la preuve de son existence revenait à Léa, soit constatée.

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement